Lundi 10 février. Ma Princesse qui n'aimait pas les princes se prenait quelques tomates sur Europe 1, un rapide passage sur Canal + et puis, surtout, cette demande d'interdiction en biblitothèques...
Je ne viens pas pour la défendre. Du haut de ses 4 ans de papier, elle est bien assez grande. Je pourrais à la limite m'étonner que cette blonde princesse toute de rose vêtue et sa fée en talons hauts heurtent les stéréotypes féminins, mais ce ne serait pas complètement honnête de ma part.
Je ne viens pas non plus défendre mon droit d'écrire sur ce que je veux comme je le veux... Par bonheur mes éditeurs ne le remettent pas en cause et l'avis de M. Copé sur la question m'importe peu. J'écris pour mes lecteurs, et non pour mes non-lecteurs, ce qui serait un peu con, convenons-en.
Je ne viens pas cependant condamner ces non-lecteurs. Tous ces parents qui ne veulent pas de "ce genre de lecture" pour leurs enfants. Chacun essaye de transmettre ses valeurs à ses enfants, ce qu'il a de plus précieux, de plus important... et que ces valeurs ne soient pas les mêmes que les miennes est, je trouve, plutôt une bonne nouvelle. C'est le signe d'une démocratie plurielle. Perso, j'ai écrit La Princesse qui n'aimait pas les princes pour ouvrir le dialogue, entre gens qui ont envie de s'écouter, de se comprendre. Pour se taper dessus, je conseille plutôt l'annuaire téléphonique. Bien épais et imprimé avec l'argent public, ce serait bête de se gêner.
Non, si je viens aujourd'hui c'est parce qu'il y a un droit fondamental qui est menacé, LE droit, peut-être même : celui d'avoir le CHOIX (C'est pas lui qu'on appelle Liberté ? Si un philosopheux veut bien confirmer...). Parce que moi aussi, forcément, j'élèves mes enfants dans mes idéaux -je n'ose pas parler d'idéologie, le bordel qui est dans ma tête n'est pas assez cohérent pour ça-, n'empêche j'ai forcément une petite idée de ce qui pourrait être pour eux une vie réussie. Mais ce schéma-là est le mien, il leur en faut d'autres pour choisir, et ces divers sons de cloches, c'est à la bibliothèque qu'ils résonnent. Alors non, on n'enlève rien... Ni ma Princesse, ni Petit Ours Brun et son papa qui lit le journal pendant que maman fait la vaisselle, ni Dora et ses exercices d'éducation pavlovienne, ni Tintin et ses propos racisto-mysogynes, ni les manuels de management qui enseignent à devenir les maîtres de l'univers, ni la Bible d'où s'élèvent les cathédrales, ni le Coran et le frisson de ses chants, ni Mein Kampf, ni Le Petit Livre Rouge, parce qu'ils font partie, eux aussi, de notre Histoire, celle avec la grande hache comme disait l'ami Perec, qu'on n'enlèvera pas non plus, évidemment. Rien. On n'ôte rien. On prend l'humain dans son entier, et c'est dans ce vaste fatras que mes enfants, vos enfants, leurs enfants, trouveront leur propre chemin d'humanité.
Voilà. C'était juste pour dire ça. Et pour l'anecdote, hier c'était aussi mon anniversaire. 35 ans. 35 ans de belle liberté et de choix assumés. Dieu, l'État, ou qui que ce soit, faites que ce même petit vent porte mes enfants dans 35 ans.
Parce que c'était hier, mais qu'en vrai c'est pour demain. Des bises les humains ;-)